Partager Par Jeanine JALKH
Justice Le Tribunal spécial pour le Liban vient de rendre publics des documents relatifs à un nouveau rebondissement dans l'affaire de Jamil Sayyed, qui ne manquera pas, une fois de plus, de faire couler beaucoup d'encre.
L'ancien directeur de la Sûreté générale avait présenté une requête devant la juridiction internationale pour faire prévaloir son droit à l'obtention des documents et éléments de preuve qui avaient conduit à un moment donné (sous le mandat du premier chef de la commission d'enquête internationale, Detlev Mehlis) à sa détention. Ces documents avaient par la suite été jugés par le TSL comme étant insuffisants, ce qui a abouti à la décision de sa libération en même temps que les trois autres officiers détenus dans le même contexte.
Dans une requête présentée le 17 mars dernier, M. Sayyed rappelle le fait que les autorités judiciaires libanaises aussi bien que le TSL s´étaient prononcés incompétents pour statuer sur l'affaire de son arrestation durant quatre ans. Il soutient qu'il est, par conséquent, de son droit de réclamer tous les documents et éléments de preuves relatifs à son dossier pour pouvoir s'adresser à une juridiction nationale (les tribunaux syriens, en l'occurrence, devant lesquels il a déjà déposé une plainte contre des faux témoins et plusieurs personnalités libanaises).
C'est ce qui ressort à la lecture de la correspondance qui a eu lieu entre l'ancien directeur de la Sûreté générale, représenté par son avocat Akram Azouri, d'une part, et le TSL, d'autre part, représenté successivement par son président, son juge de la mise en état, et son procureur, MM Antonio Cassese, Daniel Fransen et Daniel Bellemare.
Certes, l'affaire n'est pas tout à fait confidentielle puisque M. Cassese avait annoncé la couleur lors de son dernier passage à Beyrouth lorsqu'il avait brièvement mentionné la requête déposée par Jamil Sayyed auprès du TSL, en mars dernier. Sans pour autant s'étendre sur le fond de l'affaire, le président du TSL avait annoncé avoir accepté la demande de M. Sayyed, pour des considérations relevant des droits de l'homme, et notamment du droit de toute personne à présenter un recours devant la justice.
Le droit d'accès à la justice
M. Cassese rappelle dans sa correspondance adressée au juge Fransen que quand bien même le requérant n'est pas « partie » dans la procédure entamée par le TSL, puisqu'il n'est ni accusé, ni victime, ni témoin, ce dernier peut quand même se faire prévaloir de ses droits de recours devant une instance internationale car, dit M. Cassese, « les formalités purement procédurières ne devraient pas l'emporter lorsque d'importants droits risquent d'être compromis ».
Par conséquent, le président du TSL a décidé d'examiner le bien-fondé de la requête, et a habilité M. Sayyed à déposer des documents relatifs à l'affaire sans pour autant se prononcer sur le fond, puisque cette compétence revient de facto au juge de la mise en état auquel le dossier a été transmis.
Reconnaissant ainsi le droit d'accès à la justice, M. Cassese a justifié sa décision en se basant notamment sur « le droit international coutumier, tel qu'il ressort des instruments internationaux ainsi que de la jurisprudence des tribunaux internationaux et des déclarations des États ».
Ayant été saisi de l'affaire, le juge Fransen a ordonné aussi bien au procureur qu'à Jamil Sayyed de présenter leurs arguments respectifs prouvant, d'une part, la compétence du TSL pour répondre positivement ou négativement à la demande de l'officier, et, d'autre part, la qualité de ce dernier de comparaître (sa qualité d'ester) devant le TSL pour faire prévaloir ses droits en matière de documentation. Les deux parties ont été sommées de présenter leurs arguments respectifs selon un calendrier préétabli qui expire lundi 28 juin, date à laquelle M. Bellemare devra remettre au juge Fransen sa dernière réplique.
Une première
Sur base des argumentations respectives de l'un et de l'autre, M. Fransen entendra, lors d'une audience publique dont il fixera la date, le procureur et le requérant pour se prononcer enfin sur la compétence du tribunal et sur la qualité d'ester du requérant, pour pouvoir enfin statuer sur le bien-fondé de la requête.
Entre-temps, M. Sayyed a présenté, dans une première correspondance, son argumentation sur les deux points de droit requis, mettant en avant, d'une part, son droit à l'accès au dossier, « droit qui lui avait été refusé lors de sa détention ». Il avance par ailleurs le refus de la justice libanaise de confronter le faux témoin « dont les déclarations avaient justifié à l'époque sa détention ». Il prouve également la compétence du TSL à statuer sur son dossier puisque entre les dates du 7 mars (date du dessaisissement des autorités libanaises du dossier en faveur du TSL) et du 29 avril (date de sa libération), M. Sayyed « était une personne détenue par le TSL sans qualification juridique ».
Réponse du procureur : Jamil Sayyed n'étant ni accusé ni victime, il n'a pas qualité à s'adresser au TSL. Qui plus est, avance M. Bellemare qui s'est abstenu de se prononcer sur le fond de l'affaire, le TSL, qui est un tribunal d'exception, ne saurait être compétent puisque sa mission est limitée par le statut qui l'autorise à se pencher sur la seule affaire de l'assassinat de Rafic Hariri.
Ce à quoi M. Sayyed répondra en avançant plusieurs arguments, notamment une jurisprudence qui avait admis le fait que les tribunaux internationaux, même s'ils sont une émanation de la volonté du Conseil de sécurité, ne sont pas pour autant des organes administratifs, mais « détiennent un pouvoir inhérent et implicite pour rendre justice ». L'argumentation va encore plus loin en citant comme exemple le cas du tribunal du Rwanda qui avait quand même reconnu sa propre compétence pour statuer sur la demande en indemnités d'un ancien détenu, quand bien même son statut ne le permettait pas.
Il ne reste donc plus qu'à attendre la réplique finale du procureur, prévue pour lundi prochain au plus tard, avant la réponse ultime du juge de la mise en état qui devra fixer la date de l'audience et trancher sur la forme aussi bien que sur le fond.
Un débat d'autant plus passionnant qu'il s'agit, rappelons-le, d'une première en la matière qui ne manquera pas d'établir un précédent.
Rappelons enfin que la confrontation entre M. Bellemare et M. Sayyed sera d'autant plus intéressante que ce dernier n'a effectivement ni une qualité de victime ni une qualité de témoin, encore moins de suspect ou d'accusé. Par conséquent, la question de la qualité de M. Bellemare face au requérant reste entière : ce dernier sera-t-il présent en tant que procureur ou aura-t-il, à titre exceptionnel, une autre qualité pour faire prévaloir ses arguments ?
PRESS REVIEW
June 21, 2010 - L'Orient Le Jour - Le suspense se prolonge dans le litige entre le TSL et Jamil Sayyed
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Background - خلفية
On 13 December 2005 the Government of the Lebanese Republic requested the UN to establish a tribunal of an international character to try all those who are alleged responsible for the attack of 14 february 2005 that killed the former Lebanese Prime Minister Rafiq Hariri and 22 others. The United Nations and the Lebanese Republic consequently negotiated an agreement on the establishment of the Special Tribunal for Lebanon.
Chronology - Chronologie
Détenus - Detainees - المعتقلون
International Criminal Justice
Videos - فيديو
- Now Lebanon : Crowds Gather to Show Support for International Tribunal, August 4, 2010
- IRIS Institute:La creation du TSL est-elle justifiee? - June 18, 2009
- Al Manar : Interview with Ali Hajj right after his release - April 30, 2009
- Al Manar: Summary of Jamil Al Sayyed's press conference, April 30, 2009
- AFP, Freed Lebanese prisoner speaks out - April 30, 2009
- OTV : exclusive interview with Jamil Sayyed - April 30, 2009
- Al Jazeeera English : Crowds celebrate Hariri suspects'release - April 29, 2009
- OTV : report about Ali el Hajj - March 18, 2009
Liens - Links - مواقع ذات صلة
The Washington Institute for Near East Policy, David Schenker , March 30, 2010 . Beirut Spring: The Hariri Tribunal Goes Hunting for Hizballah
Frederic Megret, McGill University, 2008. A special tribunal for Lebanon: the UN Security Council and the emancipation of International Criminal Justice
International Center for Transitional Justice Handbook on the Special Tribunal for Lebanon, April 10, 2008
United Nations
Conférence de presse de Nicolas Michel, 19 Sept 2007
Conférence de presse de Nicolas Michel, 27 Mars 2008
Département d'Etat américain
* 2009 Human Rights report
* 2008 Human Rights report
* 2007 Human Rights report
* 2006 Human Rights report
* 2005 Human Rights report
ICG - International Crisis Group
The Hariri Tribunal: Separate the Political and the Judicial, 19 July, 2007. [Fr]
HCSS - Hague Centre for strategic studies
Hariri, Homicide and the Hague
Human Rights Watch
* Hariri Tribunal can restore faith in law, 11 may 2006
* Letter to Secretary-General Kofi Annan, april 27, 2006
Amnesty International
* STL insufficient without wider action to combat impunity
* Liban : le Tribunal de tous les dangers, mai 2007
* Jeu de mecano
Courrier de l'ACAT - Wadih Al Asmar
Le Tribunal spécial pour le Liban : entre espoir et inquiétude
Georges Corm
La justice penale internationale pour le Liban : bienfait ou malediction?
Nadim Shedadi and Elizabeth Wilmshurt, Chatham House
The Special Tribunal for Lebanon : the UN on Trial?, July 2007
Issam Michael Saliba, Law Library of Congress
International Tribunals, National Crimes and the Hariri Assassination : a novel development in International Criminal Law, June 2007
Mona Yacoubian, Council on Foreign Relations
Linkages between Special UN Tribunal, Lebanon, and Syria, June 1, 2007
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