L'Orient le jour - Tribunal international « Donnons à la justice le temps qu’il faut. Elle ne vous décevra pas », affirme une source diplomatique new-yorkaise, 28 march 2008
L'article de Jeanine JALKH
Attendu impatiemment par les Libanais, et surtout par les responsables politiques qui misent, un peu plus que d’habitude cette fois-ci, sur des révélations tonitruantes, le rapport que le nouveau chef de la commission d’enquête, Daniel Bellemare, remettra aujourd’hui au secrétaire général des Nations unies ne sera pas complètement dénué de nouveautés, comme l’atteste une source diplomatique à New York. Ce rapport, qui est le 8e du genre, mais le premier qui aura été établi sous la direction du nouveau chef des enquêteurs, sera en tout cas très révélateur du « style personnel » qu’adoptera le futur procureur général qui siégera au Tribunal spécial pour le Liban, dont les premières étapes de sa mise en place ont déjà été pratiquement achevées. Qu’y aura-t-il au menu de ce nouveau « rapport d’étape », qui coïncide – un pur hasard - avec le sommet arabe de Damas, dont le Liban sera le grand absent ? Daniel Bellemare, qui a pris ses fonctions en novembre dernier, aura-t-il eu le temps et les éléments nécessaires lui permettant d’apporter de nouveaux ingrédients à l’investigation internationale ? Si l’on en croit la source diplomatique précitée, le nouveau chef des enquêteurs n’a pas perdu son temps. Sur le plan de la forme, l’on devrait s’attendre à ce que ce nouveau document soit marqué par un « ton inédit et un style particulier », des éléments que l’on peut déjà deviner à l’analyse du « profil » de ce juge canadien connu pour « son extrême professionnalisme, son intégrité et une détermination à toute épreuve » (voir ailleurs), autant de qualités qui justifient d’ailleurs son choix par l’ONU en tant que procureur général, une position extrêmement sensible dans un dossier qui l’est encore plus. La conférence de presse que devra tenir en principe le juge Bellemare le 6 avril prochain, après examen par le Conseil de sécurité du rapport d’étape, sera l’occasion pour ce grand magistrat de se révéler à l’opinion publique, non seulement en tant que celui qui mènera l’investigation à son terme, mais également le procès en tant que tel. Quant au fond, le rapport dégagera cette fois-ci deux points majeurs au lien évident, à savoir « la confirmation de l’existence d’un seul et unique réseau qui serait derrière l’ensemble des attentats examinés par la commission », révèle la source, ainsi que le « lien présumé » entre les différents assassinats ou tentatives d’assassinat politiques, qui est « pratiquement prouvé pour la quasi-totalité des attentats perpétrés». Des éléments qui, tout en étant « fondamentaux » pour la progression de l’investigation, ne sont pas encore concluants – à ce stade du moins – pour ce qui est de l’identité des auteurs et des commanditaires qui « restera confidentielle jusqu’au début du procès », soutient la source qui refuse de répondre à la question de savoir si la commission a déjà des noms sur la table. « Tout ce qu’il faut savoir à ce stade de l’enquête, c’est que la fin de l’investigation n’est pas de sitôt, encore moins le début du fonctionnement du tribunal à proprement parler, ce dernier étant intimement lié à la fin de l’enquête. » Et le diplomate d’insister sur la « politique de désinformation » qui règne depuis un certain temps dans les milieux politiques et médiatiques, notamment sur la question de la date du procès que « certains analystes ou politiques ont fixée, arbitrairement, pour le mois de juillet prochain ». « Il n’y aura de procès qu’une fois l’investigation achevée dans les moindres petits détails, et une fois toutes les preuves recueillies et vérifiées, ce qui n’est pas de sitôt », insiste-t-il. Selon ce diplomate, il est temps de mettre un terme aux rumeurs, spéculations et prospectives de tout genre – qu’elles soient voulues ou non –, qui ne font que compliquer la progression de l’enquête tout en la politisant. Les experts et juristes qui planchent sur l’investigation « n’en ont que faire des interprétations politiques de l’une ou l’autre partie locale ou internationale en présence. Ils n’en sont pas plus responsables des attentes ou espoirs de certains sur les éventuels aboutissements ou résultats de l’investigation. La commission internationale est une machine indépendante qui fonctionne de manière parfaitement huilée, selon les standards internationaux, et elle poursuivra sur cette voie. La même règle s’applique pour ce qui est du tribunal, qui est toujours en instance de formation et qui ne sera fonctionnel qu’une fois Daniel Bellemare prêt pour la tâche », insiste la source. Et le diplomate de conclure à l’adresse des Libanais : « Donnons à la justice le temps qu’il faut. Elle ne vous décevra pas. »
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